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Jeune & Pro #4 / Mandy Albertengo / Yoann Maillart

Par Le 05/10/2016

Jeunes et pros 1

Jeune & Pro, notre série d'interviews de pros, continue à dévoiler les impressions et les idées de jeunes urbanistes, d'architectes, de géographes-cartographes et professionnels de l'environnement sur leur métier et leur expertise acquise au gré d'une à sept années d'expérience.

A travers ce 4è volet, Mandy Albertengo, chef de projet en urbanisme pour G2C Territoires, et Yoann Maillart, urbaniste-cartographe créateur de sa propre entreprise, aujourd'hui urbaniste-géographe pour Kinaxia, croisent leurs expériences.

 

Mandy albertengo 2

Mandy Albertengo

chef de projet en urbanisme

pour G2C Territoires, Délégation Urbanisme Sud-Est

Yoann maillart

Yoann Maillart

Urbaniste-géographe spécialisé en cartographie

En profession libérale depuis juin 2015

Avec cette interview, tout commence par un retour en arrière. Quelle était l'image que tu te faisais du métier d'urbaniste, au cours de tes études ? Et le réel de ton métier aujourd'hui ?

J'ai été formée à l'Institut d'Urbanisme et d'Aménagement Régional d'Aix en Provence. En Master 2 professionnel j'ai choisi de me spécialiser en Projet et Action opérationnelle. Je m'imaginais conseiller des élus pour les aider à élaborer leur projet de développement communal ou intercommunal et à rendre opérationnelle leur vision du territoire.

5 ans plus tard, j'accompagne et conseille en effet des élus, mais mon rôle est surtout de rendre compatible leur projet de territoire avec tout un corpus de lois, qui évolue perpétuellement, le faire évoluer pour le rendre compatible avec les documents supra communaux et les servitudes qui s'imposent au territoire. Je n'avais pas conscience de toutes ces contraintes imposées au territoire et aux élus en matière d'urbanisme. Exerçant dans la région PACA, mon travail consiste également à faire prendre conscience des enjeux en termes de réduction de la consommation d'espaces agricoles et naturels, d'environnement, de mixité sociale, d'environnement, de concertation de la population...

Lors de mes études, l'urbaniste était pour moi celui qui modelait la ville. Son intervention avait pour but de régler les dysfonctionnements dans le but d'arriver à une cohérence territoriale et sociale sur le territoire. Je voyais également en son rôle celui de médiateur devant concilier les besoins de la population, les nécessités des communes et/ou EPCI, la composante environnementale, les lois et bien sûr, l'image du territoire que la population s'en fait. J'avais également comme image le fait que l'urbaniste a pour outil principal la cartographie, biais par lequel il peut faire passer des messages.


Aujourd'hui, mon métier n'est pas si éloigné de cette vision, du moins j'essaie de la garder à proximité ! Etant actuellement à mon compte en tant qu'urbaniste-géographe, mon métier s'oriente dans l'analyse spatiale de phénomènes - d'où l'entrée géographique - appliquées à diverses thématiques, dans la réalisation de cartographies et de plans de zonage de PLU mais aussi, dans le conseil en urbanisme aux communes et aux privés et enfin, dans la réalisation de documents de planification.


J'essaie donc de faire perdurer mon "idéal" de l'urbaniste aujourd'hui au sein de mes dossiers : intervenir sur le territoire via mon rôle de conseiller afin d'arriver à un ensemble cohérent. Le plus bel exemple étant les documents de planification : l'intervention sur le territoire y est forte avec les notions de durabilité dans le temps, de prise en compte des objectifs communaux et d'impacts sur la population et la vie urbaine.

Du coup, y a-t-il un lien entre ton parcours de formation et ton métier ? Ta formation te sert-elle aujourd'hui dans l'exercice et l'acquisition progressive de tes missions ? Que penses-tu apporter de par ta formation, au sein de ton entreprise ?

Avant mon master professionnel d'urbanisme, j'ai suivi une licence de géographie et d'aménagement du territoire. L'ensemble de ma formation universitaire a été pluridisciplinaire : géographie physique, géographie humaine, théorie de l'urbanisme, planification urbaine, droit de l'urbanisme, outils fonciers. Opérationnel notamment grâce à l'apprentissage des outils de travail (traitement des enquêtes, analyse statistique, cartographie, SIG, dessin), et de gestion de projet.

Ma formation et mon métier sont en liens directs. Lors de ma première année en bureau d'études, j'ai pu m'adapter rapidement grâce à cette pluridisciplinarité acquise. En tant que chef de projet en urbanisme je fais appel à ces connaissances chaque jour. Avec les élus, un chef de projet en urbanisme doit être à l'aise aussi bien en parlant de paysage, de risque inondation, de développement démographique, de formes urbaines que de concertation.

 

En effet, je me suis attaché à garder cette vision que j'avais tant que faire se peut. J'ai donc choisi d'orienter mon parcours selon deux axes : être sensibilisé aux problématiques territoriales et disposer de compétences techniques en urbanisme et en logiciels de cartographies.


J'ai donc commencé par une licence en géographie me permettant de me familiariser avec les grandes thématiques de l'aménagement du territoire et de disposer d'une approche systémique centrée sur l'espace via ce que l'on appelle l'analyse spatiale : les problématiques de l'aménagement sont analysées via cette vision, caractérisée par le fait que l'espace est un acteur. En effet, l'homme agit sur celui-ci, ce dernier produisant à son tour, des effets rétroactifs sur l'homme, pour généraliser ! Enfin, j'ai terminé mes études par un Master 2 (Master 2 Géoprad à l'Université de Nice), celui-ci proposant une formation basée selon trois axes : aménagement et urbanisme, cartographie et SIG, durabilité des territoires et prospective.


C'est cette formation de géographe qui me sert aujourd'hui dans l'acquisition de mes missions, mais aussi l'association entre compétence en urbanisme et cartographie de même niveau. Le bagage théorique et technique fourni a été très utile dans la réalisation de nombreux dossiers ! Cela me permet alors -lorsque j'étais employé mais aussi aujourd'hui- de disposer d'une vision plus spatiale et donc, de toujours faire un rapport direct au territoire. L'analyse et la compréhension des phénomènes territoriaux est donc plus aisée à traiter notamment avec l'aide des SIG pour faire ressortir des conclusions lors de mes analyses.

Quel est le quotidien de ton travail... et des imprévus qui vont avec ? Tu peux nous parler un peu des missions que tu es amené à effectuer ? Des obstacles principaux que tu as été amené à franchir de par l'exercice de ton métier ? 

Mon travail au quotidien c'est la gestion de Plans Locaux d'Urbanisme, d'études urbaines et de ZAC dans des communes urbaines, rurales, périurbaines, littorales, montagnardes... Mes semaines sont rythmées par de nombreuses réunions avec les élus pour leur présenter nos études, les aider à se positionner, faire des choix. J'encadre et forme également des chargés d'études pour leur permettre d'évoluer et de devenir autonomes à leur tour.

Élaborer un PLU c'est commencer par produire un diagnostic du territoire, un état initial de l'environnement, identifier ensemble les enjeux du territoire, construire un projet de développement cohérent et partagé, traduire ce projet dans un zonage et un règlement.

Une mission est souvent longue et semée d’embûches pour les élus et pour les urbanistes qui les conseillent : un changement législatif qui demande une reprise du dossier et remet en cause les choix effectués par les élus, un projet de développement remis totalement en question par les élus lors de sa traduction dans un zonage, un plan de prévention des risques porté à connaissance de la commune alors que le projet de PLU était prêt à être arrêté... Tous les urbanistes doivent connaître ces situations. Un des obstacle qui m'a marqué quand j'ai commencé à exercer, et auquel je ne m'attendais pas, a été la difficulté pour gagner la confiance des élus. Il a fallu faire ses preuves et s'imposer rapidement pour gagner le respect et la confiance des élus.

Intervention lors d'une réunion publique, dans le cadre d'une révision de PLU avec évaluation environnementale

Photo reunion publique diag

Exemple de réalisation - études préalables à la réalisation d'une ZAC

Etudes prealables a une zac doc de travail

Aujourd'hui, je travaille à mon compte en tant qu'urbaniste-géographe en profession libérale.

Je dirai que mon quotidien est divisé en trois temps. Le premier concerne tout ce qui touche à l'administratif et aux relations clientèles. Le deuxième concerne mes missions en urbanisme : je travaille pour l'heure actuelle sur des petits documents de type déclaration de projet, révision allégée. Je suis également en collaboration avec un bureau d'études sur des parties de missions plus importantes tels que les PLU. Enfin, le dernier temps concerne la cartographie selon deux axes : la réalisation de plans de zonage de PLU et des analyses géographiques via la cartographie pour des clients privés.


Concernant les imprévus, on va dire que le plus compliqué lorsque l'on est à son compte et seul, c'est la gestion des délais. Jongler entre les différents dossiers, gérer les temps de procédure, faire le travail administratif, correspondre avec les clients, cela prend beaucoup de temps ! Une bonne organisation est donc nécessaire ! Néanmoins, travailler sous ce statut d'indépendant me permet de passer au-delà ce certains obstacles comme par exemple, le fait de traiter directement avec les Maires, avec les différents bureaux d'études et tous les interlocuteurs qui en incombent. Auparavant en tant qu'employé, c'était le patron qui s'occupait de ces tâches ! Désormais je dois donc discuter de problématiques administratives et techniques, négocier en quelque sorte. C'est pour moi la tâche la plus difficile car on y est pas forcément familier au début et c'est à partir de ces discussions que l'on fixe les principes de confiance et les conditions de travail pour les missions futures.

Intervention lors  d'une réunion technique
 

Yoann maillart photo intervention

En quoi la pratique (les pratiques) de ton métier a (ont) fait évoluer ta perception du métier d'urbaniste, et tes compétences en tant que tel ?

Mon objectif premier était d'accompagner et de conseiller les élus dans l'élaboration de leurs projets urbains, de réaliser des documents de planification urbaine. Mon expérience en planification urbaine m'a permis de me perfectionner en droit de l'urbanisme. Élaborer un PLU c'est également réaliser une multitude d'études annexes tout aussi intéressantes (études urbaines sur un quartier, études patrimoniales, études environnementales...)


Aujourd'hui, mon entreprise me fait confiance pour développer un nouveau métier aux côtés de ma directrice d'agence : les études de programmation urbaine. J'ai pu suivre une formation continue auprès de l'organisme Aptitudes Urbaines. Mes compétences s'enrichissent donc. La richesse de ce métier c'est bien sa diversité. La routine, on ne connaît pas.


La pratique de mon métier m'a permis de développer mon côté pédagogue, ma technique d'animation de réunions. Aujourd'hui je donne des cours au sein de l'institut d'urbanisme qui m'a formé. L'objectif est de compléter la formation pour permettre aux étudiants de mieux connaître les outils de planification urbaine et de mieux appréhender le monde des bureaux d'études.

Mon expérience en bureau d'études m'a permis dans un premier temps de me familiariser et de travailler vraiment sur les documents de planification. J'ai également pu cadrer et mettre en pratique ce que j'avais appris pendant mes études : j'ai notamment eu la possibilité de mettre en place un petit service et un suivi SIG au sein du bureau d'études. Enfin, cela m'a permis d'entrer vraiment dans ce que je trouvais important: le rôle de conseil auprès des acteurs du territoire.


Avec un peu de recul, je dirais que mon expérience d'indépendant m'apporte énormément de part le fait que je travaille seul. Je dois donc désormais aller "au charbon", apprendre ce qu'est la gestion d'une société, mais aussi mieux gérer les temps de procédure des dossiers, chercher plus d'infos qu'auparavant, organiser ma veille et surtout, proposer des solutions pour se démarquer.


Ma perception de l'urbaniste a évolué un peu car, de cette situation particulière d'indépendant, il en résulte que le métier ne porte pas seulement sur l'analyse ! C'est surtout un médiateur important du territoire. Une autre évolution de ma perception porte sur la puissance de la carte : le fait de tracer une limite à un endroit ou un autre a de fortes conséquences sur le territoire et c'est ce qui cristallise les tensions.

Retour vers le futur. Comment envisages-tu ton avenir professionnel ? Quel bilan et quelles perspectives retires-tu de ta toute relative expérience ? Ta vision a-t-elle évolué ou retour à l'idée de départ ?

Mon futur, je l'imagine sur un poste avec des responsabilités renforcées. Un poste mêlant le management, le développement commercial, la formation et l'accompagnement des chargés d'études, la gestion de projets. Si mon entreprise me fait toujours confiance, je me vois évoluer au sein de cette structure.

Au bout de 4/5 ans de pratique, ma vision a bien sûr évolué sur mon métier. Le métier d'urbaniste a de nombreuses facettes qui me sont pour certaines encore inconnues. Toute carrière d'urbaniste est unique, du bureau d'études à la fonction publique, des métiers de l'urbanisme réglementaire à ceux de la promotion immobilière, de la programmation urbaine à la prospection foncière... A nous de ne pas nous enfermer dans une seule pratique tout au long de notre carrière. La clef est entre nos mains.

Par rapport à mon expérience de jeune professionnel, je dirais que mon parcours n'a pas été de tout repos avec une embauche après mon stage de fin d'études au sein d'un bureau d'études aujourd'hui fermé, puis la recherche d'emploi, puis l'opportunité de créer mon statut en libéral. Toutefois, je trouve que mon parcours m'a apporté dans de nombreux domaines et que j'ai déjà l'occasion d'exercer dans ce que j'apprécie faire, le tout en m'attachant à garder l'idée de départ de mon idéal d'urbaniste : travailler pour arriver à une cohérence territoriale.


Mon avenir ? vaste et difficile question ! Pour le moment, j'espère continuer dans cette voie et avoir toujours la belle opportunité d'être en relation avec les professionnels du domaine.

J'espère aussi dans un second temps, essayer de "grandir". J'entends par là tout d'abord, conforter mes connaissances et mon expérience, mais aussi continuer à trouver des marchés, rencontrer plus de monde, collaborer avec d'autres professionnels voir dans un avenir plus lointain, pourquoi pas s'associer pour arriver à une structure plus importante qui sait ? Cette dernière idée me plait car c'est un challenge personnel intéressant et motivant même si ce n'est pas le plus facile. Néanmoins, c'est une voie qui me permet d'apprendre plus rapidement et qui me permet d'observer d'autres facettes du monde professionnel en urbanisme avec joie et curiosité.


 

Mandy Alb.

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Note complémentaire : interview réalisée au printemps 2016. Depuis la rentrée 2016, Yoann Maillart est géographe-urbaniste pour Kinaxia.

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